Les montreurs de Lanterne magique

Publié le : 11 mars 20203 mins de lecture

« Je lis partout que la lanterne magique a été inventée vers 1630 par le jésuite Athanase Kircher, et que l’on en trouve la description dans son Ars magna lucis et umbroe. Je l’y ai vainement cherchée.

La lanterne magique est certainement plus ancienne, et l’on peut en trouver l’origine dans les lanternes vives que les pâtissiers exposaient à la porte de leurs boutiques pour attirer les passants. Ces lanternes étaient circulaires, en toile ou en papier huilé. Entre eux et la lumière placée au milieu, des figures grotesques, formées de carton découpé, étaient fixées à un cercle mouvant, auquel on donnait une impulsion qui la faisait tourner. Les figures formaient alors des ombres mouvantes. Ces sortes de lanternes magiques avaient été d’abord en usage dans les représentations des mystères. Mathurin Régnier parle d’une vieille Égyptienne, qui :

Ressembloit, transparente, une lanterne vive
Dont quelque paticier amuse les enfans,
Où des oysons bridez, guenuches, éléfans,
Chiens, chats, lièvres, renards et mainte estrange beste
courent l’une après l’autre

Comme on le voit, les pâtissiers en conservèrent l’usage jusqu’au dix-septième siècle.

En 1656, la lanterne perfectionnée avait cessé d’être mise au rang des amusements enfantins. On s’en divertissait dans le monde, comme à cette soirée de l’hôtel de Liancourt, dont Loret crut devoir rendre compte. Il termine ainsi son récit :

Cette magie est innocente,
J’en sçay la finesse excélente ;
Je n’en aprens point le secret

En 1692, un religieux, un père Théatin, se distinguait par la manière dont il exécutait « des figures pour la lanterne magique ». Celle-ci est ainsi décrite par Richelet : « C’est une petite machine d’optique, qui fait voir dans l’obscurité, sur une muraille blanche, plusieurs spectres et monstres affreux, de sorte que celui qui n’en sçait pas le secret croit que cela se fait par art magique ».

Ce spectacle fut surtout recherché par la bourgeoisie à la fin du dix-huitième siècle, et cette spécialité était presque exclusivement tombée aux mains de pauvres savoyards, qui, vers la fin de l’été, retournaient dans leur pays avec l’argent qu’ils avaient gagné à Paris durant la belle saison. « Ils promènent la lanterne magique sur leur dos, écrit S. Mercier, et l’annoncent le soir au moyen d’une orgue nocturne dont les sons deviennent plus agréables et plus touchans parmi le silence et les ténèbres ».

Les lanternes magiques étaient fabriquées par les lunetiers. »

Alfred Franklin (1830-1917) – Dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercés dans Paris depuis le treizième siècle – 1906

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