Les billets de la fin du mois – Louisa, Eugène Labiche et Vidocq – 1844

Publié le : 18 septembre 20193 mins de lecture

Mademoiselle Louisa K’eésen était actrice du théâtre de la porte Saint-Martin ; jeune et jolie, elle trouva bientôt protecteur dans la personne de M. Eugène Labiche, jeune littérateur coupable de quelques quarts de drames et de vaudevilles, et auteur d’un roman inédit quoique imprimé. M. de Courchamps allait en faire la découverte, quand le National, troublant la douce quiétude de la Presse, a révélé l’origine du Val funeste de l’auteur des Mémoires de madame de Créqui.

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Mais revenons à M. Eugène Labiche qui, pour faire excuser ses attentats littéraires, dépensait gaiment son fonds avec son revenu. Il était amoureux fou de mademoiselle Louisa, qui feignait pour lui la plus vive tendresse, et qui l’aidait de son mieux à ensevelir son capital. Des envieux, jaloux du bonheur des deux amants, jetèrent des soupçons dans l’âme d’Eugène. On lui fit entendre que son ange adoré s’humanisait souvent avec de jeunes et galants mortels. On lui parla de déjeuners acceptés, de rendez-vous nocturnes et de mille autres choses encore. Eugène refusait de croire à tout cela ; mais comme il est très jaloux, il fut trouver Vidocq et le pria de faire surveiller les actions de mademoiselle Louisa. Celle-ci, ne se doutant de rien, continuait gaiment le cours de ses folles amours, et devenait tous les jours de plus en plus infidèle. Chaque infidélité nouvelle valait à Eugène les marques du plus tendre amour ; celui-ci aussi se montrait très prodigue en promesses. Il voulait acheter à Louisa un équipage et une maison de campagne. Lorsque celle-ci recevait ces promesses, elle était folle de joie. Cependant, comme l’espérance ne nourrit pas, elle se hasarda à demander quelques centaines de francs à son généreux protecteur.

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— Je n’ai pas d’argent, dit Eugène, mais demain je t’enverrai des billets. Le lendemain, mademoiselle Louisa recevait, sous enveloppe trente petits billets qui donnaient jour par jour un compte-rendu exact de sa conduite. M. Eugène avait été beaucoup plus spirituel dans sa vengeance que dans ses œuvres littéraires. Mademoiselle Louisa vient de partir pour la province, en maudissant Vidocq, créateur des assurances intimes et conjugales.

Mystères galans des théâtres de Paris – 1844

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